
Par Lauryn Benae Etota, Chloé RANDRIAMIARINTSOA, Eva Talma, Aram Terzian, Emma Tricoli
Ecouter ici https://radio.amicus-curiae.net/podcast/green-deal-greenwashing/
Le greenwashing, une pratique qui trompe les utilisateurs en jouant sur leur perception d’une image écologique, ralentit considérablement les efforts de transition vers des pratiques plus durables. Cette technique de communication utilisée par les industriels prend des formes variées, tels que des slogans vagues ou exagérés, et est souvent caractérisée par un manque d’explications, voire des promesses trompeuses, quant aux méthodes concrètes employées pour la préservation de l’environnement.
Les conséquences de cette pratique sont nombreuses : sur le plan économique, elle affaiblit la confiance des consommateurs trompés, qui se détournent alors plus facilement des produits labellisés « responsables », et fausse la concurrence en évinçant les entreprises qui investissent dans de réelles pratiques durables, bien plus coûteuses. Sur le plan environnemental, le greenwashing ralentit aussi la transition écologique, en invisibilisant les efforts pour protéger l’environnement. En 2020 c’étaient ainsi plus de la moitié des allégations écologiques qui étaient exagérées ou mensongères sur le marché européen.
Face à ces dérives industrielles, l’Union européenne tente d’imposer un cadre aux entreprises : avec la directive sur les allégations écologiques de 2023, celle sur la protection des consommateurs contre le greenwashinget le règlement Taxonomie verte, elle impose plus de transparence et de précision quant aux activités des entreprises pour pouvoir se prévaloir de l’argument de durabilité.
Un tel cadre normatif semble nécessaire alors que le greenwashing reste très commun dans certains milieux, tels que celui du textile et de la fast-fashion, où des entreprises comme H&M présentaient des collections « durables » qui ne présentaient en réalité aucune rupture avec leur méthodes de production de masse ou d’utilisation de matériaux non recyclés. Cette stratégie de communication se retrouve chez Total Énergies pour le milieu énergétique, chez Ferrero pour l’agroalimentaire, ou Volkswagen pour les transports, avec à chaque fois la révélation de dissimulations ou d’exagérations de la part des entreprises pour se donner une image plus « verte » et s’en servir comme argument de vente.
La condamnation de la pratique reste à nuancer, car les entreprises doivent communiquer sur leurs avancées environnementales pour attirer de nouveaux consommateurs et financements. On pourrait alors admettre qu’en présence d’engagements vérifiables, de discours mesuré de la part de l’entreprise, et en constatant que son impact environnemental progresse, l’argument de durabilité peut être toléré car il ne nuit pas à la transition écologique, représentant au contraire une avancée dans cette optique. Cette ambiguïté est souvent exploitée dans la pratique du greenwashing, il faut alors s’assurer que les ambitions environnementales affichées sont confirmées par des actes concrets et vérifiables par des preuves tangibles et un degré suffisant de transparence. Or on manque encore d’un cadre légal satisfaisant pour différencier la communication sincère des abus.
Pour que les consommateurs évitent le piège du greenwashing, certaines pratiques sont recommandées : se tourner vers des labels et certifications officielles (Ecolabel européen, Fairtrade, etc), se méfier des discours marketing en termes vagues sans preuve tangible, faire des recherches sur le rapport des marques à l’écologie et l’éventuelle politique de transparence qu’ils emploient quant à leurs pratiques responsables, mais aussi communiquer sur les abus et soutenir les ONGs et actions en justice. L’ensemble de ces éléments, couplé à des efforts de la part des entreprises et à un renforcement du cadre juridique, pourrait bien mener au bannissement complet du greenwashing au sein de l’UE.
Ressources :
- https://www.observatoire-greendeal.eu/entreprises/les-allegations-environnementales-trompeuses/
- https://www.urbanomy.io/actualites-analyses/directive-europeenne-contre-greenwashing
- https://globalclimateinitiatives.com/greenwashing-decryptage-dune-pratique-controversee-et-comment-sen-proteger/
- https://www.euractiv.fr/section/energie-climat/news/les-regles-contre-le-greenwashing-sont-en-peril/
- https://www.un.org/sites/un2.un.org/files/high-level_expert_group_n7b.pdf
- https://plana.earth/fr/academy/greenwashing-regulations#:~:text=Le%20greenwashing%20est%20très%20répandu,pratiques%20commerciales%20déloyales%20selon%20les
- M. Serafimova, « Sustainability agreements in competition law — the fine line between consumers washing “green” and “greenwashing” cartels », R.E.D.C., 2022/3, pp. 317-328
- L. Marion, E. Dronnier, « Entreprise – Préciser, étayer, démontrer : les propositions exigeantes de la Commission européenne pour lutter contre l’écoblanchiment (greenwashing) », La Semaine Juridique Entreprise et Affaires, 2023/5, n°20-21, act. 459
- E. Kowalski, J. Cappelié, « 3 questions – « Greenwashing » : le cadre normatif européen se précise », La semaine juridique – Entreprise et affaires, avril 2024, n°16, 340
- L. de Redon, « Le greenwashing n’est plus durable ! Projet de directive européenne contre l’écoblanchiment », Énergie-Environnement-Infrastructures, juin 2023, n°6, comm. 50